Le pèlerinage de l'âne Tuco

Date de publication : Aug 09, 2010 9:36:53 AM

Sac au dos, bâton de pèlerin à la main et âne gris au bout de la longe, Pauline n'est pas passée inaperçue à Marciac, dernière étape d'un long périple. Elle parcourt les chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle, en compagnie de Tuco, un âne de 5 ans. La jeune Rhonoise de 27 ans est partie de Cluny, en Bourgogne du sud, et est arrivée jusqu'à Saint-Jean-Pied-de-Port dans les Pyrénées-Atlantiques. Son frère Clément, 19 ans, l'a rejointe à Lourdes pour l'accompagner durant la dernière semaine.

« Aujourd'hui ou jamais »

"Je voulais aller jusqu'à Saint-Jacques-de-Compostelle. J'avais tout préparé, l'âne était en règle, vaccins, visite médicale, puce… Sauf que depuis le 1er juillet, une carte d'identification des haras nationaux est obligatoire, impossible de passer la frontière, déplore Pauline. La question s'est posée, est-ce que je vais quand même jusqu'au bout ? Je ne pouvais pas l'abandonner à Saint-Jean-Pied-de-Port, on est parti à deux, on reste à deux coûte que coûte."

Cet échec apparent est tout relatif. Tuco, l'âne, n'était pas dressé au début de l'épopée, il n'avait jamais marché. La jeune fille n'ayant aucune expérience, ni de la randonnée intensive, ni des ânes, son entourage était peu confiant quant à ses chances de réussite. "Tuco n'avait jamais vu autre chose que sa petite prairie. Je n'avais pas le temps de tergiverser. Trois mois, c'est ce que j'avais devant moi. Je me suis dit, c'est aujourd'hui ou jamais. J'essaye, même si je dois rentrer bredouille." Et Pauline est partie, sans entraînement, sur les chemins mythiques de Saint-Jacques, avec 30 kilos de matériel et une énergie à toute épreuve.

« Des débuts rock'n'roll »

"Le premier mois était rock'n'roll, se souvient-elle. Tuco avait peur de tout, des papillons, des voitures, des chiens, de l'eau. Traverser un petit cours d'eau, c'était une épreuve ! Il a fallu prendre beaucoup de temps pour le rassurer, le mettre en confiance. Maintenant tout va bien."

Grâce à la charge que porte Tuco, le sympathique duo est autonome, le budget est réduit au minimum, l'hospitalité du Sud-Ouest y est sûrement pour quelque chose. À peine arrivée à Marciac, la fine équipe n'a eu qu'à se laisser guider par Gérard Foltier, un local amoureux des ânes. En deux temps trois mouvements, ils étaient installés dans le champ du Gersois, la tête à l'ombre d'un chêne et les pieds dans l'eau.

"On va de gîte en camping, parfois sauvage. Sur les chemins de Saint-Jacques, on rencontre beaucoup de gens qui franchissent une étape forte de leur vie, c'est un chemin mystique, fait de rencontres fortes, de gens sur qui on peut compter", souligne l'aventurière. Pauline se dit croyante et pratiquante, pourtant, ce n'est pas la spiritualité qu'elle recherchait en prenant la route. "Pour passer la frontière espagnole, on nous fait remplir un formulaire pour approfondir les raisons qui nous poussent à aller à Compostelle. Moi j'ai rempli toutes les cases. C'est l'occasion de faire une retraite religieuse, mais aussi de faire du sport, de rencontrer des personnalités, des coins de paradis. J'ai réalisé mon rêve, et ça, c'est une réussite à part entière."

Source : http://www.sudouest.fr/2010/08/09/le-pelerinage-de-l-ane-tuco-156830-2481.php

SUD-OUEST, 9 août 2010 06h00 | Par GWENNOLINE LE CORNEC