« Les mains libres » au ciné-club : quand une cinéaste livre... sa propre histoire d'amour
Date de publication : Sep 21, 2010 6:16:32 AM
mardi 21.09.2010, 05:16 - La Voix du Nord
Le ciné-club Atmosphères a du mérite. Jeudi, il a réuni 109 spectateurs exactement pour un film sorti en 2009 en catimini. ...
« Les Mains libres » de Brigitte Sy avaient été distribuées en une quinzaine de copies seulement sur l'Hexagone. La réalisatrice, et son acteur principal Carlo Brandt, étaient eux aussi présents à la séance du Gaumont. Avec à la clef un moment rare... Rien, rien à voir avec cet autre film de prison, Un prophète de Jacques Audiard, portrait en force de la naissance d'un caïd, en tôle.
Non. Brigitte Sy, elle, choisit pour sa caméra l'évasion, à peine cette dernière posée derrière les barreaux. Ce qu'elle raconte, touche après touche, c'est la naissance d'un amour, entre un taulard menuisier et une cinéaste venue faire un film en univers carcéral. Improbable ? Peut-être. Mais après tout les histoires d'amour le sont si souvent. Brigitte Sy est bien placée pour le savoir.
Le coeur de son film est là. Dans l'approche discrète que se font ses deux êtres, la caméra à l'exacte hauteur de ce trouble qui naît. Et c'est fascinant.
Brigitte Sy rend comme rarement le cinéma a rendu l'émoi des premiers instants. Mains qui se touchent et se brûlent, gestes seulement esquissés. De peur que...Sous le charme, le public a retenu son souffle. Et retenu ses questions. Cette cinéaste dans le film, c'est ? Brigitte Sy a répondu, simplement. « Oui, j'avais tourné un film en prison. Durant six mois. On a dû l'arrêter. Un manque terrible. D'où l'idée de ce film sur le film ». Question, encore, de la salle, qui s'en excuse presque : mais cette histoire d'amour... ? « Oui, c'est la mienne ».
Les Mains libres se terminent par une dédicace. La photo de Michel, en noir et blanc, taulard pour de vrai, et qui s'est tué pour de vrai, à moto, un an après sa sortie de prison.
Brigitte Sy sait de quoi elle parle. Elle l'a défendu, son film, dont on pourrait penser qu'il idéalise presque le monde carcéral, comme en le pacifiant. « Non, j'ai montré "Les Mains" en prison. Les détenus ont apprécié qu'on n'y montre pas la violence. La vie en centrale est ainsi. Il peut y avoir de gros clashes, mais le plus souvent, les centrales sont des tombes où il ne se passe rien ». La confirmation est venue des derniers rangs du public : les parents d'un responsable pénitentiaire sont là. Ce même responsable qui jour après jour a aidé à la réalisation du film, tourné à la maison d'arrêt de Meaux. Brigitte Sy les salue, repart dans son histoire. « Oui, c'est difficile de se livrer aux autres.
Difficile, pas seulement en prison ». Se livrer aux autres ? Elle l'a fait. Magnifiquement. •
T. T.